Alaa lance un appel à l’aide de Basrah. La tant louée gestion de la sécurité par les troupes britanniques n’est visiblement pas à la hauteur des enjeux…
Il devient visiblement urgent de fermer la frontière avec l’Iran, et que le gouvernement iraqien mette les points sur les i aussi bien avec Sadr qu’à Fallouja, puis partout où des troubles auraient lieu.
Daily Archives: dimanche 15 août 2004
Mauvaises nouvelles de Basrah
CQFD
Vendredi 13 Août, l’émission « Le téléphone sonne » de France avait pour thème l’Iraq. D’abord, le présentateur pose le décor:
le climat d’insécurité prévaut toujours en Iraq. On croyait les tensions appaisées dans les villes saintes après la mise en place du gouvernement transitoire, il n’en est rien depuis 10 jours et surtout ces dernières 48h la violence des combats a redoublé dans les villes de Najaf, Nassiryah, Bassorah, ainsi que dans les faubourgs déshérités de Bagdad
Voilà plus d’un an que la violence redouble tous les jours, aussi j’imagine que s’il existe un endroit qui se rapproche de l’Enfer (au sens « lieu de mort, de désolation et de désespoir total, infini et irrémédiable »), celui-ci se situe bien en Iraq, du moins si je n’avais pour seules sources que les médias européens.
Après ce constat catastrophiste, la question fatidique est posée:
comment sortir l’Iraq de cette impasse, pour répondre à vos questions au 01…..
… un chercheur au CNRS, Ocham Daoud, visiblement bien informé, le correspondant à Bagdad et un ex-général US. Si les auditeurs posent les questions, les experts donnent les réponses…
Voilà les questions posées lors de l’émission:
question par e-mail:
est-il majoritaire chez les Shiites ?
Réponse catégorique de l’expert: non. Al Sadr n’est pas majoritaire, et au sein de la communauté shiite il est isolé: aucun imam autre que lui n’est présent à Najaf, il est désavoué par Al Sistani, le plus respecté. Et pan dans les dents pour tous ceux qui écrivent et répètent que c’est un soulèvement général des shiites…
Xavier, Montpellier:
j’ai entendu dire que les positions américaines autour de Najaf étaient situés aux alentours des cimetières, et je me disais qu’au niveau symbolique c’est pas terrible, ça me faisait penser qu’est-ce qu’il pourrait se passer en Europe si demain il y avait une armée musulmane autour de Rome en train d’essayer de saisir quelqu’un, et je me disais il y a quand même des analystes compétents aux Etats-Unis, quelle part ils ont dans le processus décisionnel, est-ce que autour des états-majors on en retrouve car c’est à se demander si il y a des gens qui ont réfléchi à la portée symbolique de ce qu’ils sont en train de faire à Najaf
Les Américains sont des imbéciles, donc évidemment ils font ce qu’il y a de pire au niveau symbolique. Ou peut-être qu’Al Sadr et ses troupes trouvent refuge dans le cimetière et dans le mausolée de l’imam Ali pour échapper aux tirs US, sachant justement que l’armée US fera preuve de restreinte et ne ripostera pas. La première hypothèse, celle de Xavier, s’appuie sur le cliché anti-américain qui veut qu’ils soient des brutes stupides incapables d’appréhender toute culture autre que leur propre inculture, la seconde s’appuie sur des faits. Les troupes US ne tirent pas sur des lieux saints, et sachant qu’elles appliquent ces règles, leurs ennemis en tirent profit…
Hubert:
pour moi, les combattants de Najaf ne sont pas des terroristes, ils se battent pour leur ville, ils n’ont jamais posé de bombes. Deuxième point: les Américains prétendent vouloir imposer la démocratie en Iraq. Mais la démocratie, ça consiste à faire voter le peuple tel qu’il est. Mais apparemment les Américains veulent écraser tous leurs adversaires et après organiser le vote. Dans ce cas là, qu’est ce qui reste de la démocratie ?
Ce ne sont pas des terroristes, sauf qu’ils font régner la terreur: d’après Ocham Daoud, Al Sadr pose des bombes dans les salons de coiffure (c’est pas islamiquement correct!), on a pas le droit d’écouter la musique, de boire de l’alcool, d’être autre chose que musulman etc… En gros: Al Sadr c’est un taliban iraqien.
Evidemment il faudrait le laisser faire, lui et son « armée du Mehdi », imposer son régime islamique en Iraq, car c’est très démocratique tout ça.
Question de Jean-Phillipe de Mont de Marsan:
Ce qui est incroyable c’est qu’avant la guerre on avait un peu prédit tout ce qui arrive aujourd’hui. Les USA sont-ils vraiment incapables de faire leur mea culpa sur le chaos qui règne en Iraq ?
Tout avait été prédit et son contraire que dans l’ensemble certaines prédictions se sont révélées bonnes. Pourquoi croire que l’armée US aurait été incapable de faire les mêmes, puisque par définition elle a accès à bien plus d’informations que le quidam ? Il faut donc penser que les moyens mis en oeuvre répondent aux besoins estimés. Faut-il, ou aurait-il fallu plus de soldats US ? Moi je réponds non, ou peut-être plus de « SOF » (Special Operation Forces) que de troupes régulières, moins efficaces pour des opérations de petite envergure, d’embuscade, de surveillance etc… mais là encore je ne sais pas vraiment ce qui se passe sur le terrain et donc j’ouvre ma grande bouche tout en ignorant certainement que les SOF font sans bruit un travail de grande ampleur en Iraq.
Cédric de Ladignac:
dans quelle mesure on peut imposer la démocratie à un pays qui n’a connu que le tribalisme ?
Est-ce la peine d’essayer la démocratie en Iraq ? Et de cette manière, par une guerre ? Ce sont deux questions qu’il faut traiter séparément: si vous répondez non à la première, c’est que vous pensez que les Iraqiens n’ont pas la culture politique nécessaire, qu’ils ne comprendront pas comment ça marche, qu’ils n’accepteront pas d’être dirigés par des gens d’une autre tribu qu’eux, d’une autre religion, etc. Mouais. Tu t’es vu quand tu tiens des propos limites racistes ?
Faut-il imposer la démocratie par la force ? En France, Robespierre a dit oui, avec à la clé des centaines de milliers de morts. En Iraq les centaines de milliers de morts c’était sous Saddam.
La force a été appliquée non pas aux Iraqiens mais à ceux qui monopolisaient le pouvoir. Par quel autre moyen l’aurait-il abandonné, ce pouvoir ? Super-Kofi aurait mis sa cape et convaincu Saddam d’organiser des élections ? Mais c’était déjà fait, et Saddam avait eu 100% des voix (ou un peu moins peut-être…)!
Suit une pause dans les questions d’auditeurs, et une intervention du correspondant à Bagdad qui déclare, grosso-modo, que la vie était meilleure sous Saddam: plus d’électricité (vrai uniquement pour Bagdad, faux pour le reste du pays, faux si on fait la somme Bagdad+reste du pays), on pouvait se promener la nuit (vrai: sous Saddam la mort n’avait pas les habits du terrorisme, mais ceux de la police politique omniprésente), il y avait du travail (dans le parti Baas, les prisons…). Bref encore un journaliste qui n’est pas sorti de Bagdad, voire de son hôtel… Un conseil pour lui: qu’il lise Chrenkoff.
Camille, du Jura:
au vu de la situation actuelle, le chaos, les islamistes ont-ils des chances de gagner les élections en Iraq ?
Pour l’instant ils distribuent pas des tracts mais des bombes. C’est un programme électoral qui rencontre un écho positif d’après vous ?
Mamadou, de Gayon (Eure):
les Américains ont libéré les Iraqiens de la dictature. Aujourd’hui les Iraqiens voient les Américains comme une force d’occupation et veulent qu’ils partent. Moi je pense que les Nations-Unies doivent retrouver leur crédibilité et jouer leur véritable rôle. [etc]
Mais bien sûr, les mêmes Nations Unies qui pendant des années ont profité des largesses de Saddam via le programme Oil for food ? (dont, d’ailleurs, personne ne parle dans les médias…) Les mêmes Nations Unies qui interviennent avec grand succès au Soudan ? En Tchétchénie ? Au Tibet ? A Cuba ? En Iran ? Il faut arrêter de déconner: l’armée US est la seule en mesure militairement de faire face, et si l’ONU n’a aucune crédibilité c’est tout simplement que c’est un ensemble de fonctionnaires corrompus issus de pays aux intérêts divergents.
Mail de Anne Lise, Montfort:
Les Américains font-ils aveuglément confiance au gouvernement de George Bush ?
Même après le 11 Septembre, la côte de popularité de Bush n’est jamais montée au niveau du chiffre atteint par Chiraq en 2002, ou pendant sa campagne anti-guerre en 2003. Et même aujourd’hui si on pose la question aux Français, combien sont-ils à s’opposer à la politique étrangère de Chiraq ? 5% ? 1% ? Vous êtes combien à lire ce site, et à m’approuver ?
Emmanuel, Paris:
Dans l’hypothèse de l’installation d’une démocratie, ou au moins d’un Etat avec un peu de liberté, quel serait l’impact sur la région ?
Heh. Il faut poser la question aux Syriens, aux Séoudiens, aux Iraniens… Seule question pertinente de tout le lot!
Ces émissions sont très révélatrices du niveau réel d’information des Français, et des conclusions qu’ils en tirent: des informations biaisées, beaucoup d’omissions, des amalgames, tout cela ne concourt pas à se faire un tableau réaliste de l’Iraq… et à partir d’hypothèses fausses comment arriver à une conclusion juste ?
Mise à jour:
un lecteur me fait remarquer que:
Je me rappelle qu’après la 2ème guerre mondiale les communistes ont eu un tiers des votes: 1er parti politique en France. L’empressement avec lequel le peuple français donne tous les pouvoirs au » grand homme », sauveur de la nation, comme de Gaulle ou Pétain, Napoléon m’effraye.
D’autre part une grande partie du peuple français a voté JM Le Pen au 2ème tour de Présidentielle 2002. Aussi je me demande si le peuple français est mûr pour la démocratie.
Et tac. Il a oublié Chiraq dans ses « grands hommes »…