Daily Archives: mercredi 24 août 2005

Enclave

J’étais passé au travers de quelques articles savoureux sur le retrait israëlien de Gaza dans Libération. Voici donc quelques extraits agrémentés de commentaires:

Le premier: Palestiniens, les oubliés du retrait (à retrouver aussi sur Pères Fondateurs)

[…]Ariel Sharon devient-il un John Wayne en butte aux méchants desperados ­ les colons récalcitrants

Dès les premiers paragraphes on sent que les auteurs (ils se sont mis à deux!) ont un léger problème… la suite le confirmera…

Dans l’opération du retrait de Gaza, la société israélienne a réussi, une fois de plus, à faire oublier un acteur essentiel de la pièce : les Palestiniens. Mais rien ne serait plus dommageable pour l’avenir que d’oublier les habitants de la bande de Gaza, 175 fois plus nombreux que les colons qui mobilisent l’objectif des caméras.

Encore un complot sioniste! La société israëlienne toute entière a fait oublier les Palestiniens à tous les médias! Car souvenez-vous, même quand des Israëliens sont victimes (ici, de leur propre gouvernement, contre leur gré), ce sont les Palestiniens les victimes, et c’est d’eux qu’il faut parler!

Une première remarque s’impose : l’opération menée de main de maître par Ariel Sharon n’est pas le fruit exclusif d’une décision politique forte du Premier ministre israélien, mais aussi le résultat d’une résistance militaire qui, tout au long de l’Intifada, a rendu le maintien des forces occupantes dans la bande de Gaza de plus en plus difficile. L’activité de la résistance n’a jamais faibli, malgré la violence de la répression : 1 855 tués et 12 808 blessés par l’armée israélienne dans la bande de Gaza

Résistance militaire ? Faire sauter des bus, tenter de faire sauter une maternité (comme dans un cas récent…) ? C’est ça une « résistance militaire » ? Des militaires portent des uniformes et combattent d’autres militaires en uniforme. Les « résistants » palestiniens portent pour seul uniforme leurs ceintures d’explosifs qu’ils actionnent dès lors qu’ils peuvent tuer des Juifs.
Appréciez le chapitre sur la « répression »… vous pensez que l’ONU a compté les celui-là ? (pour ceux qui ne suivront pas le lien: un terroriste tué alors qu’il tentait d’infilter une colonie devant être évacuée quelques mois plus tard…)

Pour mesurer le poids de ces chiffres, il faut les rapporter à la population de 1,4 million d’habitants : proportionnellement, c’est comme si en France, on avait à déplorer 82 000 morts et 567 000 blessés.

Rapprochement fallacieux: des volontaires pour se faire sauter en Israël ou en Iraq on en trouve dans tous les pays musulmans et même au-delà! Les premiers islamikazes britanniques n’ont pas sauté le 7 juillet à Londres, mais en Israël.
Par contre rares on peut rapprocher le nombre de tués lors d’attentats en Israël des résidents en Israël et là…

c’est un soulagement certain que va connaître cette population, soumise depuis quatre ans à l’enfermement, au danger physique, et à la misère pour une grande partie d’entre elle.

Malheureusement si ce n’était une volonté obsessionnelle d’aller tuer du Juif de certains Palestiniens, il n’y aurait pas eu besoin de checkpoint, de barbelés et toutes les mesures de sécurité mises en place suite aux attentats et tentatives incessantes.

si le retrait s’arrêtait là, si Gaza restait une immense prison ­ simplement un peu agrandie par la libération de ce qui l’encombrait ­, le pari risquerait fort d’être perdu. Or, pour l’instant, on ne voit pas que l’aéroport rouvre bientôt, qu’un embryon d’activité maritime reprenne prochainement, que la circulation vers la Cisjordanie soit facilitée, que le commerce gaziote échappe au contrôle israélien (au poste de Qarni), que les travailleurs puissent retourner s’employer en Israël

Pourquoi ne pas demander à l’Egypte de construire un port juste à côté de Gaza ? Pourquoi ne pas y construire un aéroport aussi ? Pourquoi ne pas faire appel à la solidarité arabe ?

Comme le note un rapport récent du Bureau de coordination des affaires humanitaires (Ocha) de l’ONU, «le plan de désengagement aura, par lui-même, très peu d’impact sur les perspectives économiques palestiniennes». Dans une situation où 40 % de la population est au chômage, et alors que les moins de 15 ans représentent 46 % de la population, il est indispensable que l’activité économique puisse redémarrer, ce qui passe par la levée progressive des contraintes et des fermetures imposées aux Palestiniens, à Gaza comme en Cisjordanie.

A lire de tels articles on a l’impression que la bande de Gaza et la Cisjordanie forment des enclaves dans le territoire israëlien. Evidemment il n’en est rien: la Cisjordanie, comme son nom l’indique, a une frontière avec la Jordanie, dont elle faisait partie avant 1967, et Gaza a une frontière commune avec l’Egypte (et une façade maritime), dont elle faisait partie avant 1967!
Si ce proto-pays veut se développer, ce n’est pas vers Israël qu’il faut se tourner, mais vers les voisins arabes! Mais il faudra peut-être d’abord faire le ménage dans l’Autorité Palestinienne, modèle de dictature du Tiers Monde, incompétente et prédatrice.

Et un second article: Décolonisée, Gaza reste entravée

«Bien sûr, on est content qu’ils s’en aillent, grommelle le berger. […] Impossible de l’emmener à l’hôpital par un jour de bouclage. Ils interdisent même les ambulances.»

Même les ambulances, car les terroristes les utilisaient pour faire passer des explosifs.

Mais la grande interrogation des Gazaouites, c’est de savoir s’ils pourront retourner travailler ou vendre leurs produits en Israël. Voyager, commercer est affaire de survie dans ce territoire surpeuplé au taux de chômage record. Or pour l’heure, personne ne sait de quoi demain sera fait. «Que gagnerons-nous à ce retrait si Israël ferme toutes les portes ? demande le vieux bédouin. Rien ! Gaza restera une prison, plus grande, plus confortable, mais toujours une prison.»

Gaza est une prison si Israël n’ouvre pas grand ses frontières aux Palestiniens. Ces Palestiniens si contents de mettre les Juifs dehors se demandent maintenant comment ils vont vivre sans eux…

Tant que la question du contrôle des frontières ne sera pas résolue, ces projets risquent de rester lettre morte. Quel entrepreneur privé choisirait de s’implanter à Gaza sans la garantie de pouvoir exporter sa production ? Les procédures de sortie de Gaza, totalement dépendantes des impératifs sécuritaires d’Israël, restent bien trop aléatoires pour attirer des capitaux, malgré le coût ridicule de la main-d’oeuvre.

Les sorties vers Israël bien sûr, car les autres ils les contrôleront!

«Nous allons quand même entamer les travaux, promet Dahlan, puis nous négocierons. Car si nous n’avions aucun contrôle sur nos frontières, nos eaux territoriales et notre espace aérien, cela signifierait que ce retrait n’est qu’un nouvel avatar de la vieille occupation israélienne.»

Il est pourtant si simple de contourner ces problèmes… mais non, mieux vaut blâmer Israël.

A propos de la misère des Palestiniens, rien ne vaut un petit tour par le CIA Factbook:

he beginning of the second intifadah in September 2000 sparked an economic downturn, largely the result of Israeli closure policies; these policies, which were imposed in response to security interests in Israel, disrupted labor and commodity relationships with the Gaza Strip. In 2001, and even more severely in 2003, Israeli military measures in Palestinian Authority areas resulted in the destruction of much capital plant, the disruption of administrative structure, and widespread business closures. Including the West Bank, the UN estimates that more than 100,000 Palestinians out of the 125,000 who used to work in Israel or in joint industrial zones have lost their jobs. International aid of $2 billion to Gaza Strip and the West Bank in 2004 prevented the complete collapse of the economy and allowed some reforms in the government’s financial operations.

Les Palestiniens sont dans la misère du fait de la 2nde Intifadah. Avant ça ils vivaient mieux que la moyenne des Arabes autour d’eux (Egyptiens, Jordaniens). Et les frontières avec Israël étaient ouvertes: ils étaient 125.000 à travailler pour des Israëliens. Dommage que l’aide internationale ait remplacé la coopération économique: sans cette aide la pression économique aurait peut-être été insoutenable pour les Palestiniens, ce qui aurait pu lancer un mouvement « anti-guerre » en leur sein!